Le kungsleden en monocycle

Je pars samedi dans le nord de la Suède (départ d’Abisko) pour tenter le kungsleden sur mon 29 pouces Quax (+ bonnes chaussures de rando pour les chemins trop accidentés/pentus).
180 km de TT en solitaire en 11 jours, au delà du cercle polaire, sans eau courante ni électricité, ni réseau GSM.

J’essaierai de publier quelques photos si les élans en mal d’amour me laissent revenir… :laughing: et de vous dire si c’est à faire ou si c’était finalement un plan pourri.

Bonnes vacances à tous !

Mais, mais, mais… tu vas galérer, non ?

Pour l’avoir fait sur qqs kilomètres y’a qqs années (rando sur 3 jours), il y a bcp de passages sur des planches qqs centimètres au dessus du sol… où il faut pas se rater !

Superbe aventure en tous cas… prends un max de photos, cet endroit est magique !

Salut Chouch, c’est bien beau tout ça mais quand est-ce qu’on te revoit sur une roue en région parisienne ou dans une aventure par de lointaines contrées :question:

Ma 29 est remontée à Paris, il faut toujours que je change les roulements, que j’emménage, que je trouve un job… mais sinon peut-être qu’il faudrait que je songe à m’y remettre un peu, tu as raison…

J’y compte bien :wink:

Mais en effet, c’est la première fois que j’y vais mais de ce que j’ai pu en lire, ça a l’air vraiment extraordinaire…

[récit de voyage en direct avec un très léger différé de tout pile 2 semaines :laughing: ]

Stockholm, samedi 7 août, 18h. J-1 [photos]

Après une semaine de tourisme tranquille, visitant un peu de la Norvège puis de la Suède, me voici fin près pour mon périple. J’ai acheté tout ce qu’il faut de fruits secs et noix diverses, ainsi que quelques victuailles bien riches en glucides. J’avais prévu 2kg de bouffe, j’en suis au moins à 4kg. Je redoute que le poids du sac me gène plus que je ne l’imagine au cours des randos. Le monocycle est resté bien sagement emballé dans le sac de voyage que je lui ai cousu, démonté et tous les éléments bien solidement scotchés à même la roue, mais tout cette semaine à le transporter partout sans pouvoir grimper dessus m’a quelque peu frustré.

Me voilà installé dans le train (ou plutôt nous voilà installés dans le train, car il semble qu’en chemin un copain de Teddy, un élan, m’a adopté). Une très bonne place ma foi sur un fauteuil isolé (donc sans voisin ronfleur) et personne derrière, côté fenêtre pour bien profiter du paysage. L’espace derrière mon siège me permet de bien caler le sac du monocycle et de garder un oeil dessus même si, voyageant en Suède, il y a en réalité très peu de risque qu’on me le vole.

Pour les mauvaises nouvelles :
-les sièges sont très peu inclinables et parfaitement inconfortables,
-il pleuvait à seau sur Stockholm aujourd’hui et je suis trempé. Il ne fait pas super chaud dans le wagon, genre 18-20°C, espérons qu’ils mettent le chauffage sinon je risque de commencer mon expédition enrhumé, il y a mieux comme conditions pour le départ…
-les voyageurs qui grimpent dans le wagon sont beaucoup plus et mieux équipés que moi. J’espère que c’est eux qui ont fait le mauvais choix ou bien qu’ils ont en vue un autre treck que le Kungsleden.

Le train a démarré, un long voyage de 16h m’attend, plus de 1500 km vers ma destination demain matin : Abisko Turiststation…

Super reportage, on attend la suite.

Merci.

Abisko, dimanche 8 août, 12h. Jour J !!! [photos]

Comme je m’y étais attendu, j’ai très mal dormi. Je n’ai pas arrêté de me retourner, encore et encore pour finalement dormir 4 petites heures tout au plus, en plusieurs fois qui plus est.
Il faut dire que la situation de Abisko, au delà du cercle polaire n’aide pas à s’endormir. En effet la luminosité est telle que vers 4h du matin j’ai pu observer les renards à l’affût dans les champs presque comme en plein jour. Mais au moins, ça occupe les insomnies. Et comme si 16h de train ce n’était pas suffisant, le notre est arrivé avec plus d’une heure de retard. Mais absolument rien d’inquiétant pour mon planning.
Après mon petit-déjeuner à base de yaourt pour monocycliste tôt ce matin, je n’y tenais plus, j’ai déballé et monté le 29". Tout s’est déroulé au poil, rien n’a été abimé ni perdu malgré les 2 transports en avion qu’il a déjà subit. Le sac maison et le scotch ont tenu le coup.
Je n’ai eu qu’une seule remarque concernant le monocycle posé derrière mon siège. Elle est venue d’un garçon suédois d’une douzaine d’années (qui bien entendu maîtrise un anglais impeccable et te trouve tes mots quand ton vocabulaire fait défaut…) qui pratique lui-même un peu de flat avec ses copains, et qui avait l’air très intéressé par l’expérience que j’allais démarrer.

Le train qui s’apprête à arriver à Abisko s’est pas mal vidé. Beaucoup de gens sont descendus à Kiruna, la « grosse » ville du coin (18000 habitants). Mais nous sommes tout de même une trentaine encore armés de nos sacs à dos et chaussures de rando.
Je descend du train qui lui va finir son trajet à Narvik en Norvège. Il fait relativement bon et il n’y a pas trop de vent. Surtout, il y a très peu de nuages ce qui, de ce que j’ai pu lire sur la région, ne devrait pas durer…
Première chose à faire, aller s’équiper à l’office du tourisme : carte de membre STF (Svenska Turistföreningen) qui pour environ 15€ pour les jeunes me donne droit à plus de 10€ de réduction chaque nuit en refuge (et oui, malgré mes 25 ans j’ai encore un tarif réduit jeune -50% ! ), les 3 cartes IGN qui couvriront mon parcours au cours de ces 12 prochains jours (même si le chemin est relativement bien balisé, on n’est jamais trop prudent, et cela me permettra éventuellement de faire quelques changements d’itinéraire selon mes humeurs), et quelques victuailles de dernière minutes.

Bon et bien il ne me reste plus qu’à m’habiller (je trouve un bosquet parfait pour l’occasion, à part qu’il est infesté de moustiques) et à faire les derniers réglages de ma monture.

13h, après des semaines d’attente et de préparation de ce voyage, me voilà enfin parti ! Mon sac à dos de 50L pèse dans les 16 kg, et déjà sur cette route goudronnée qui mène au départ du Kungsleden cette charge me déséquilibre assez sévèrement. Le départ du Kungsleden est marqué par un porche. Je demande de l’aide à un homme, qui lui vient de terminer son treck, pour immortaliser l’instant, mais celui-ci n’avait manifestement pas bu que de l’eau du torrent ou bien il était trop épuisé par son treck pour tenir l’appareil photo horizontal…
Le début du chemin doit se faire à pied car trop de pierres hautes tapissent le sentier. Le soleil est avec moi, je suis en short et T-shirt et j’ai déjà bien chaud (j’apprendrai plus tard qu’il faisait 18°C).
Pour cette étape, je marcherai plus que je ne roulerai. Je me suis pris 4 grosses gamelles dont ma boîte à thé peut attester la violence des chocs. Les chutes sont assez douloureuses, en particulier en raison des 16kg que je porte sur le dos et qui viennent m’écraser sur le sol la tête en avant. 3 égratignures seulement, et un nez épargné grâce à la visière du casque qui m’a probablement sauvé d’un très précoce arrêt de l’aventure. Mais j’en sors bien sonné quand même.
Je suis pressé de finir cette étape car les moustiques et autres mouches mordeuses deviennent très insistants. Mais je n’imaginais pas qu’une fois l’étape finie ce serait encore pire. A peine arrivé à l’auberge, je dois m’habiller des pieds à la tête pour me protéger en attendant que le gardien daigne s’occuper de moi et me laisse rentrer dans l’auberge. Des moustiques par dizaines se ruent sur moi en un mouvement trop bien organisé pour ne pas être prémédité…
Le gardien m’explique le principe de fonctionnement de l’auberge (chacun fait sa vaisselle, balaie la chambre, va couper du bois si nécessaire, va remplir les seaux d’eau potable et vider ceux d’eau sale …) J’assimile toutes ces infos, j’en profite pour lui poser quelques questions sur les baies qu’on trouve en quantité le long du chemin. Il me dit qu’elles ne sont pas poison mais tout à fait infectes. Je décide donc de ne pas être curieux. Puis je file à la douche, ou plutôt au lac glaciaire qui fait office de baignoire géante. La température est difficilement supportable et le rinçage du shampoing un vrai supplice.

Je boucle cette étape de 15km en 4h, pauses comprises et j’ai dû rouler 5 à 6 km tout au plus, le reste du temps je marchais en faisant rouler le monocycle devant moi. Par moment, des planches en bois relativement étroites permettent de franchir des zones marécageuses. Celles-ci sont la plupart du temps roulables, quand l’espace entre les planches est plus petit que la largeur du pneu… Je suis un peu frustré par le peu de km que j’ai pu rouler. Il s’avèrera que cette étape était pourtant une des plus roulantes …

Je passe ma soirée sur l’adorable plage au bord du lac, à quelques pas de l’auberge où le Mont Giron m’offre un spectacle sublime et incroyablement apaisant (si l’on oublie les moustiques que je combats grâce aux multi-couches de vêtements short, pantalon, protège tibias, pull, K-Way) 1000m au dessus de moi, pendant que les vagues que le vent fait sur le lac me chantent leur berceuse. Différence de culture oblige, alors qu’allongé sur la plage à lire mon bouquin, je vois 2 nanas venir se laver dans le lac, dans le plus simple appareil. Le soir j’entends des voix françaises autour du refuge, j’entame la conversation avec 3 lyonnais/bordelais/annécien, avec qui je ferai quelques étapes par la suite.
Il est 23h, et je peux grâce à la lumière du ciel écrire ce journal. Vive le cercle polaire et vive la grosse nuit qui m’attend, dans un vrai lit ![/url]

Abiskojaure, lundi 9 août, 07h. Jour 2 [photos]

Partager sa chambre avec 2 ronfleurs qui, je suppose, s’étaient lancés le défi de faire le maximum de bruit, c’est top ! Surtout quand, épuisé de ma petite nuit de la veille, j’aurais bien fait une grasse matinée jusqu’à, soyons fou 9h ! Et bien non, car en plus de ronfler, mes colocataires sont des lève-tôt et oublient d’être discrets quand ils se lèvent. Du coup, réveillé, je me lève à 7h comme tout le monde. Ce n’est après tout pas plus mal car la journée s’annonce longue, 21km au programme.
Un petit déj’ à base de pain Wasa et de confiture et me voilà prêt à attaquer cette nouvelle étape.
Celle-ci commence par un long parcours où je n’ai pas la moindre opportunité d’enfourcher ma roue, du coup je n’ai plus qu’à marcher. Je commence à me féliciter d’avoir choisi une grosse paire de chaussures de rando plutôt que des tennis légères.
Après 30 minutes je croise les 3 Français rencontrés la veille qui commencent à lever le camp. Je m’autorise une première pause pour donner un cours d’initiation au monocycle puis reprends ma route. Nous nous retrouvons quelques km plus loin et je fais un bout de chemin en leur compagnie jusqu’à la pause du midi où nous nous écartons un peu du chemin pour profiter d’une magnifique vue depuis une petite colline. Nous sommes dans le creux d’une vallée entourée de sommets montagneux et dans laquelle s’étendent quelques magnifiques lacs. Une fois le sac à dos posé je peux profiter des rochers à peu près plats sur lesquels nous nous sommes installés pour me dégourdir les pédales.
Je reprends mon chemin en donnant RDV le soir aux 3 Français pour la suite de la leçon de mono. Après ces 8 km non roulants, la vallée m’offre un terrain de jeu idéal pour enfin rouler. Je profite du moment car je suppose qu’il sera de courte durée. Et en effet, une fois sorti de cette vallée ça se gâte et je dois me remettre à marcher sur plus de 5 km. Les quelques planches me permettent néanmoins d’exercer mon agilité sur cette portion, mais les distances ne dépassent en général pas 50m. Sur la fin du parcours en arrivant sur le refuge je retrouverai un terrain un peu plus favorable mais ayant les pattes coupées je décide de finir cette étape à pied.
Lorsque j’arrive sur le campement, je suis épuisé. Je serai seul dans la chambre cette nuit. Au moins je ne serai pas dérangé par les ronflements.
Avant de passer à la douche (enfin au torrent quoi) je vais profiter du sauna. C’est incroyablement réparateur même si, je dois l’avouer, j’avais une certaine appréhension après que le gardien m’a prévenu que c’était un sauna « à la méthode suédoise », et mixte qui plus est (et il s’avère que nous n’étions effectivement pas qu’entre hommes). Je décide de vivre l’expérience à fond et, ce n’est pas si bizarre que ça en fait. Par contre, je dois laisser la place après 10 minutes seulement aux vrais Suédois car j’ai à faire à des dingues de la louche qui arrosent les pierres toutes les minutes et je commence à suffoquer sérieusement là-dedans.

Je déguste comme la veille mes nouilles chinoises puis avant d’aller m’écrouler dans mon lit et ne plus m’en relever avant le lendemain matin, j’allume un feu dans le poêle.
Je ne recroiserai pas les Français ce soir.

Les étapes de ton périple son super bien écrites, on en veut encore plus, comme une histoire dites devant un bon feu de camp. :wink:

Je ne connait pas la longue distance et le Cross mais en voyant les photos (géniale aussi) je pense que les sentiers dans ces vallées doivent être un pur plaisir à rouler.

Continue !

salut a toi
magnifique projet que tu as la j’atend avec impatience la suite!
tu a un frein sur ta 29?
et je ne connais pas du tous se parcourt, il y a beaucoup de dénivelé? dans qu’elle sense? dis nous tous les francais sont curieux!

encore bravo a toi j’admire j’aurais aimé te suivre!
Amiou

A vrai dire je crois m’être attaqué à un peu trop gros pour moi. Je n’ai croisé que 2 femmes VTTiste sur mon chemin en 12 jours. Apparemment pour l’une d’entre elles le treck était roulable à 80%, avec un sac à dos de 3kg. C’est sans aucun doute un pur plaisir de se promener dans ces paysages, après en monocycle c’est plus discutable …
Jusqu’à cet instant du treck, j’avais des doutes sur le fait que c’était une bonne idée. Mais la suite ne m’aura finalement pas fait regretter mon choix !

@ amiou :
oui, j’ai installé un HS33 sur le 29", dans les descentes il m’a été assez utile. Cependant il n’aura pas résisté très longtemps aux pierres lors de mes nombreuses chutes …
Pour le dénivelé il est relativement accessible. Enfin ça reste quand même une région montagneuse et certaines côtes sont assez violentes, mais elles sont finalement assez peu nombreuses et surtout assez courtes pour la plupart. Je veux dire que je n’ai pas passé 1 journée entière à grimper un col. Les journées commencent souvent par une montée puis une zone de plateau sur la plus grande partie du trajet et enfin une descente en fin de journée. Mais globalement sur l’itinéraire de 180km de long, on doit faire à très peu de chose près autant de descente que de montée.

J’essaierai de faire un bilan à la fin du récit mais globalement : très content de l’avoir fait, un peu mitigé sur le fait d’avoir amené un mono, 29" qui plus est, sur cet itinéraire (il y avait vraiment des jours sans!), mais surtout un peu frustré du peu de zones vraiment roulables. Mais alors quand c’était roulable, c’est vraiment du bonheur à tel point qu’on garde un sourire figé ; c’est un défi de chaque instant pour tenir en équilibre, choisir son chemin, slalomer entre les pierres, sauter par dessus certaines, … et ça ça vous procure des sensations absolument géniales. J’ai dû faire jusqu’à 1km sans chuter, pas plus, et peut-être jusqu’à 3 km d’affilé sans avoir à marcher.
J’aimerais vraiment y retourner pour retenter l’expérience mais avec une plus petite roue et sur un autre itinéraire proche du Kungsleden dont une VTTiste qui connaît très bien la région m’a parlé, et qui est beaucoup plus roulable.
Quant à l’aspect treck « en solitaire » (seul et sans aucun moyen de communication car le réseau GSM ne passe pas), c’est une chose vraiment géniale à expérimenter et qui vous fait rencontrer plein de gens sympa en chemin (le fait de rouler en mono rend les gens très curieux et je dirais qu’une centaine de personnes m’ont posé des questions sur mon périple, et j’ai réellement sympathisé avec une dizaine de personnes en chemin). Mais je crois que si je repartais, cette fois je n’irai pas seul.

Merci pour vos encouragements, ça fait plaisir !

Super ton périple, photos super chouettes… Ca a dû être bien dur!

Qu’est-il arrivé à ton frein?

Alesjaure, mardi 10 août, 10h, jour 3 [photos]

Que c’est bon de dormir. La nuit est beaucoup plus calme quand on ne partage pas sa chambre. Il est 10h et j’émerge tout juste. J’ai des courbatures un peu partout et mes chevilles commençant à en avoir marre des cailloux et des réceptions suite aux chutes de mono, je peine à aller jusqu’à la cuisine. Cette étape de 15km seulement va être la bienvenue. En regardant par la fenêtre je constate avec joie qu’il n’y a toujours pas de pluie en vue.

Je me prépare et démarre la rando vers 11h. Je commence en marchant histoire de m’échauffer un peu, mais comme je le préssentais malgré le faible kilométrage, ma petite forme va rendre cette journée bien longue. Après quelques démarrages en mono sur des zones pourtant assez faciles, je dois me rendre à l’évidence : je n’arrive tout simplement plus à rouler sur plus de 3m. Mes cuisses refusent catégoriquement de fournir l’effort nécessaire pour avancer sur le mono… J’abandonne pour le moment et continue mon chemin à pied. Après 3km je trouve le terrain idéal pour rouler. Je prends un peu confiance en moi et je commence à rouler sur quelques dizaines mètres … avant de m’étaler bien gentiement, une fois de plus. Cette fois ma cheville gauche a pris un sérieux coup et je peine même à marcher maintenant. En plus de cela ça se passe juste sous les yeux de 2 randonneurs qui ont dû apprécier ce spectacle navrant … Plus gênant encore, sur cette chute pourtant anodine, je subis ma première crevaison du treck. Je m’installe sur le bord du chemin pour la réparation. Je répare la double crevaison (pincement de la chambre à air entre la jante et une des nombreuses pierres bien affutées) avec une de mes 2 rustines et installe ma seconde chambre à air. N’ayant jamais crevé avec le 29" en 8 mois d’utilisation sur des chemins similaires, je m’étais dit que 2 chambres à air et 2 rustines seraient largement suffisantes. Pas si sûr …
En chemin, j’installe l’appareil photo sur pied pour réaliser quelques clichés de ma monture et moi devant un joli panorama. Une âme charitable va me venir en aide pour me prendre en photos dans des situations plus « spontanées ».
A la pause du midi, les moustiques sont de retour. J’enfile donc la tenue de rigueur. Sur la photo on peut voir que rien que sur ma jambe droite, 4 d’entre eux s’acharnent à vouloir transpercer mon fute et la paire de Veggie 661 qui se cache en dessous … Bon courage les vampires ! :smiley:

Le reste des 15km se révèlera peu propice à rouler, mais en grimpant une pente dans les 20-30°, très rocailleuse, je regrette de ne pas avoir fait le chemin en sens inverse car ç’aurait été un spot génial ! Qu’à cela ne tienne, alors que j’aperçois à quelques kilomètres l’auberge annonçant la fin de l’étape, je peux me permettre de dépenser quelques calories. Arrivé en haut de la côte je dépose mon handicapant sac à dos et me lance plein de motivation sur ce parcours de 500m environ. Je retrouve mes sensations, cette impression de survoler le chemin est tout simplement grandiose. J’ai le droit à des « Respect man! » de la part de quelques randonneurs que je croise ou que je dépasse. Ca fait du bien au moral tout ça. Tellement de bien à vrai dire que je regrimpe cette côte (à pied) que je me redescends immédiatement en roulant. Je ferai ces allers-retours 6 fois de suite ! Lors de la descente j’ai droit à une vue splendide sur une longue vallée. Après chacune des descentes j’ai encore plus d’énergie qu’à la précédente. Ce qui m’arrêtera n’est d’ailleurs pas l’épuisement mais ma seconde crevaison de la journée à la suite d’une chute sans bobo. Je me résigne à abandonner cet endroit magique et finis l’étape en roulant mon mono crevé, je ne le réparerai qu’une fois arrivé à l’auberge. Oui mais voilà, un monocycle crevé ça paraît beaucoup plus lourd à pousser et les 3 derniers km me paraissent bien longs. Je réalise soudain que je ne peux plus me permettre qu’une crevaison, à la 4ème je suis bon pour pousser le mono sur tout le reste du trajet, soit plus de 120km …
Le soir au refuge j’engage la discussion avec une Anglaise et une Australienne qui, regardant par la fenêtre, m’annoncent l’arrivée d’une cycliste. Cela me rassure un peu, je me dis que je ne suis finalement pas le seul dingue à tenter l’aventure en roulant.
Nous discuterons pas mal le soir, elle m’apprendra qu’elle est partie ce matin d’Abisko (mon point de départ également, il y a 3 jours :open_mouth: ), soit 50km environ en 8h. Et qu’elle a l’intention d’accomplir les 60 km qu’il lui reste jusqu’à son point d’arrivée dans la journée de demain. J’applaudis la performance, qui me semble particulièrement remarquable sur ce type de terrain. Nous discutons de ces ******* de pierres qui ne nous épargnent que très rarement, ainsi que des planches en bois qui se font un malin plaisir à laisser un trou juste un peu plus grand que la largeur de la roue (pourtant montée avec un pneu de 2.2"). Elle me dit qu’elle arrive à rouler sur 80 à 90% des terrains. Chapeau !
Un peu plus tard, me voyant réparer ma chambre à air avec ma dernière rustine en stock, elle me propose de me dépanner de quelques unes supplémentaires. J’accepte TRES volontiers ! et je conserve ces 4 rustines tombées du ciel bien à l’abri, comme des objets d’une grande valeur.

Une fois de plus ce soir, j’aurai toute une chambre pour moi tout seul.
Je mange un chili con carne déshydraté, pas top top et surtout manquant cruellement de sel, m’enfin ça change des nouilles chinoises. Je me promets de ne pas oublier d’amener du sel avec moi si je recommence un treck de ce genre.

Je me plains beaucoup (« Aïe ma cheville! », « y’en a marre des pierres… », « saletés de moustiques! », « y’en a marre de pousser le monocycle! ») mais dans le fond le parcours était relativement facile, et largement accessible à des randonneurs novices (quant à monocycler, c’est une toute autre histoire). C’était surtout du bonheur, et pousser le monocycle sur des dizaines de km était tout à fait acceptable.
C’est juste mon fond râleur, j’avais beau être en Suède, je reste Français ! :smiley:

Pour mon frein, une vis de purge était un peu desserrée, je suppose à la suite d’une mauvaise chute sur cette vis au cours du 4ème jour (demain). Sur ce parcours il n’apportait cependant qu’un confort, et à de rares occasions, il n’était donc pas indispensable.

Vraiment géniale. (on se croirai dans le film Into The Wild, bref)
J’ai vu aussi que tu n’as pas croisé que des randonneurs, comme un caribou, non ?
Et puis, partir à l’aventure avec 1 chambre à air et 2 rustines c’est un gros risque !
Le lieu à l’air très prisé par les randonneurs j’ai l’impression, tu n’es pas parti si seul en fin de compte. :wink:

Et tout ça en 3 jours seulement !

Tout à fait Powwa, c’est effectivement un caribou (aussi appelé renne). Sur la suite du parcours j’en croiserai des troupeaux entiers, ils vivent en liberté mais pas à l’« état sauvage » à proprement parlé. La population Same s’occupe de ces troupeaux, mais en pratique si j’ai bien compris, ils ne voient que très peu les hommes. Ils sont simplement parqués dans des réserves immenses. Les Sames ont l’intelligence de prélever certains rennes pour leur consommation mais de manière très modérée.
Il y a également des élans, des renards, des ours et des gloutons mais je n’ai malheureusement croisé aucun d’entre eux (ceci dit je n’aurais pas fait le malin devant un ours ou un glouton …)

En ce qui concerne le nombre de randonneurs, c’est une bonne remarque. Il se trouve que j’ai assez mal choisi le moment pour faire ce treck. Tous les ans il y a sur ce parcours une course appelée Fjäll Raven qui consiste à parcourir en un minimum de temps les 110km qui relient Nikkaluokta à Abisko, et dont 75% du parcours se fait sur l’itinéraire que j’ai suivi (mais dans le sens inverse de celui que je suivais). Et ce ne sont pas moins de 2000 compétiteurs qui foulent le Kungsleden en 1 semaine…
Mais par chance je n’ai eu la compagnie de ces randonneurs que pendant les 4 premiers jours. Dans la suite du treck la course était terminée et il m’est arrivé de ne croiser que 5 ou 6 randonneurs de toute la journée !

Tjäktja, mercredi 11 août, 9h jour 4 [photos] [vidéo]

Je me réveille et ma première pensée va aux étapes d’aujourd’hui et demain qui me réjouissent car selon ma carte, hormis une grosse côte très courte en début de cette étape, je devrais longer le fleuve dans le creux d’une vallée. J’ai bon espoir de trouver des terrains assez plats, très érodés et terreux. J’entrevois enfin la possibilité de profiter pleinement de mon mono qui, jusqu’ici, m’encombre plus qu’autre chose.
Les quelques premiers kilomètres se font sur un pierrier où même évoluer à pied relève du défi. Arrivé en haut de la côte je la vois, devant moi, s’étendant presque à perte de vue, sur au moins 25km, la fameuse vallée tant attendue ! Le panorama est tout simplement éblouissant. Je commence la descente, rapide, vers le fond de cette vallée. Joueur, je me la tente même en roulant. Trop difficile pour mon niveau et surtout handicapé par la taille de ma roue et le sac à dos (ben oui, ça ne peut pas être simplement ma faute :laughing: ), je finis inévitablement par une chute. Avant ce treck, je m’étais mis en tête de compter le nombre de chutes au cours de ces 180km ; j’ai arrêté environ 1h après mon départ le premier jour… Pendant cette chute je me tords assez méchamment la cheville, la droite cette fois. Au moins maintenant je boite de façon symétrique ! Cette petite entorse me poursuivra jusqu’à la fin de mon treck …
Je m’arrête quelques instants pour immortaliser sur pellicule ce paysage et déguster quelques fruits secs. Une fois arrivé dans le bas de la vallée je me fais rattraper par les 3 Français que j’accompagnerai jusqu’à la fin de la journée. Après la pause du midi, une petite sieste réparatrice s’impose. Au soleil et avec juste ce qu’il faut de vent pour éloigner les moustiques. Avant de repartir, je profite d’avoir posé le sac à dos pour me faire quelques descentes en direction du fleuve sur une végétation rase et très agréable à rouler.

L’arrivée au camp est une single track entourée d’une bordure de terre de 50cm de haut, alternant piste terreuse et planches en bois. Je me régale de ce moment, comme d’habitude trop court. C’est typiquement pour ce genre de moments que je ne regrette pas d’avoir emmené avec moi mon demi-vélo !
Après m’être installé dans le refuge, je retourne sur ce chemin sur près d’1km juste pour le plaisir de rouler. Je franchirai même quelques passages de ponts en bois sans rambarde, par dessus le fleuve, sur des planches d’à peine 30cm de large (voir la vidéo).

Le soir je donne sa 2nde leçon de monocycle à Paul, le pianiste Lyonnais. Je suis impressionné par la rapidité (et l’acharnement) avec laquelle il progresse. En une quinzaine de minutes il réalise son premier tour de roue, soit environ 2.50m, et cela en grimpant sur le 29" sans support. Qui plus est, le terrain est herbeux et pas franchement plat. Je serais surpris de ne pas le voir franchir les portes du CDK d’ici quelques semaines !
En bons Français souhaitant s’adapter aux coutumes locales, nous testons le sauna à 60°C immédiatement suivi par la baignade dans l’eau du torrent à 5.5°C !!! Nous y prenons goût à tel point que nous renouvellerons l’expérience plusieurs fois de suite, en essayant de battre notre record de temps passé dans l’eau (j’ai dû tenir un peu plus de 15 secondes immergé jusqu’au cou).
La soirée se déroulera ensuite sur leur campement où nous partageons un repas.
La nuit sera fraîche, pas plus de 4°C, et particulièrement humide. Je me félicite d’avoir opté pour le dortoir plutôt que la tente.

Sälka, jeudi 12 août, 10h, jour 5 [photos]

Ce matin je retrouve les 3 Lyonnais frigorifiés par leur nuit en tente. Je leur propose du thé à l’abri et dans la chaleur du refuge, et ils iront même se réfugier quelques instant dans la torkrum, pièce surchauffée à plus de 30°C prévue pour faire sécher les fringues.

Nous prenons la route mais, rapidement, n’arrivant pas à suivre leur rhytme, je les laisse partir devant. Je ne les retrouverai qu’à la pause du midi.

Sur le chemin, je vais faire une rencontre assez insolite, celle d’un renne qui se montre franchement menaçant. La queue bien relevée, la tête haute, celui-ci me fait face alors que je le prends en photo, et commence à me tourner autour en s’arrêtant de temps en temps pour frapper le sol avec ses sabots. Je fais appel à ma mémoire pour savoir si j’avais lu quelque part que ces bêtes pouvaient se montrer agressives jusqu’au point de charger un homme. En remarquant ses cornes (même si celles-ce sont relativement petites pour un renne), je prends la décision de ne pas m’éloigner trop de mon monocycle pendant la séance photo, histoire d’avoir sous la main moi aussi une défense. Finalement après avoir fait 2 tours autour de moi, l’intimidation s’arrête et je le regarde repartir vers son troupeau à quelques dizaines de mètres de là, raison pour laquelle probablement il se montrait si menaçant.
Bilan du nombre de kilomètres passés sur le monocycle ce matin : 0.3km, et encore je vois large. La vallée ne tient décidément pas ses promesses. Et l’après-midi ne sera pas meilleure.

Les Lyonnais voulant s’attaquer au Mont Kebnekaise, sommet de la Suède avec ses 2110m, ne se trouvant pas sur mon itinéraire, cette soirée que nous partageons sera la dernière pour moi en leur compagnie.
Pour l’occasion et sur les conseils de Coline et Pierre - un couple de Français, Lyonnais également, rencontrés sur le campement - nous décidons de nous préparer un bon repas à base de champignons locaux, une espèce de cèpes, qui abondent autour du refuge. La cueillette et la préparation sont assez rapides, la dégustation le sera encore plus.
Nous finirons la soirée à l’abri des moustiques et du froid dans l’auberge que je partage avec 9 Suédois ronfleurs :exclamation: . Paul, Kévin et Lionel m’initient à la coinche, jeu de carte mélangeant les règles de la belote et du tarot.

encore encore!
Il est agréable de suivre ton épopée jour par jour!

Bravo à toi pour ce périple, le récit est super à lire :slight_smile:

Dis moi tu avais déjà réalisé des treks en monocycle avant celui là?
Je comptais faire des étapes du GR5 en Alsace cette été mais ça ne s’est pas fait, dommage :frowning: