Road Trip in New Zealand du 08/01/2010 au 14/01/2010

Préambule

Carte du circuit

Le choix de ce circuit plutôt qu’un autre ne fut pas facile. Je disposais de 7 jours, d’une roue, et d’un sac à dos. Je tenais à passer un maximum temps sur la route pour pour voir du pays. Mes critères de choix furent donc :
Un circuit assez long - Une région où la météo serait plutôt favorable - Minimiser les temps de transport pour rejoindre telle ou telle autre région - Un circuit offrant des étapes pas trop longues - Et enfin un relief avec un dénivelé global raisonnable compte tenu du fait que je roulerai « assez chargé ».
N’ayant pas eu l’occasion de peser mon sac pendant mon périple, je l’ai reconstitué studieusement une fois de retour à la maison.

Sac vide : 1,830 kg
Sac plein : 9,800 kg sans eau ni nourriture (y compris Teddy 109 g)
Ravitaillement pour la journée, en moyenne : 1,5 d’eau + quelques barres de céréales 0,150 kg + Cacahuètes 0,200 kg + 1 ou 2 fruits 0,200 kg. Soit environ : 2 kg
Total : 11,800 kg
Dans la sacoche de selle (vide : 0,140 kg) j’ai réussi à caser : Outils, chambre à air - éclairage - antivol. Soit : 1,100 kg (à déduire du sac à dos)

Cela peut paraître lourd pour quelqu’un qui ne campe pas. J’avais quand même prévu, en cas de galère, de quoi dormir à la belle étoile ou sous un abri de fortune. J’avais pris un sac de couchage léger avec une housse de sac qui finalement ne m’ont pas servi.

Je me mis donc à éplucher soigneusement mon « Cycling New Zealand Guide », acheté à Paris avant mon départ, pour y trouver la randonnée idéale … Bien sûr je ne manquai pas une occasion sur place de demander conseil sur la meilleure destination pour mon projet.
Finalement fort peu de circuits proposés dans le guide remplissaient toutes les conditions pré-citées. Mon choix se porta donc sur la région de Nelson - Marlborough, située au nord ouest de l’île du sud.
Une fois la décision prise il me fallut planifier mon circuit plus précisément de manière à trouver gîte et couvert à chaque étapes. Pour se faire je m’adressai à Charlotte de la réception du YHA de Wellington qui outre sa gentillesse fut d’une grande efficacité. Tous les « backpackers » de NZ sont un peu des offices du tourisme. C’est donc en quelques clic et coups de téléphone, depuis la réception du YHA, que toutes les réservations des « backpackers » sur ma route furent prises y compris celle pour le ferry pour me rendre à Picton, point de départ de mon circuit.
Le ferry, au premier abord pas très confortable, me réserva cependant une bonne surprise. En cherchant une place pour m’installer confortablement durant ces 3h20 de traversée j’ai repéré des cabines avec couchettes qui normalement sont fermées et réservées aux conducteurs de camions. Certaines d’entre elles étaient restées ouvertes. Coup d’oeil à droite - Coup d’oeil à gauche - Pas de camionneur à la recherche de sa couchette. Et hop ! Je me suis mis en mode [sieste allongé]pour 3h. Prudent, j’avais quand même placé Teddy en mode [guetteur éveillé]en cas d’alerte. Avant de finir ma nuit sur le ferry j’ai rencontré deux cyclo-touristes australiens, qui eux, étaient sur un road trip bien plus long que le mien. J’étais assez envieux, d’une part de leur long voyage, d’autre part de leur remorque mono-roue (BoB) Un jour j’y viendrai …

En fait mon circuit débuta à Wellington puisqu’il me fallut me rendre à mono au terminal d’embarquement du ferry. Ce n’est certes pas les 2 km entre le YHA et le terminal qui méritent d’être cités mais plutôt l’heure bien matinale et surtout mes premiers tours de roue avec le sac au dos. C’est donc à 6h00 du matin que je quittai l’hôtel pour un appareillage prévu à 8h00. Les démarrages en 36" n’ont jamais été mon fort, certes. Mais la combinaison du départ matinal, du sac au dos chargé, et de quelques rafales de vents assassines a rendu mes premiers tours de roue bien pitoyables. Je n’ose vous dire combien de vaines tentatives ont précédé mon départ effectif. A ce moment précis une réflexion me traversa l’esprit : " Et bien mon pote t’es mal barré. Il te reste encore 330 km à faire …"
L’épisode suivant me confirma la justesse de ma pensée. A la fois euphorique suite à mon démarrage enfin réussi et pas encore tout à fait réveillé, je me suis retrouvé à rouler du mauvais coté de la route, me faisant par là même, une belle frayeur.
Me voilà donc parti sur ce circuit annoncé pour 331 km sur lequel les points forts sont les forêts denses aux espèces végétales et animales endémiques - Les routes en bord de mer - Les montagnes en toile de fond - Les vignobles.
Sept jours plus tard, j’étais de retour à Picton sans bobo mais avec plein d’images dans la tête. Finalement j’aurai parcouru près de 350 km en 5 jours de route. Je me suis octroyé 2 jours de repos à Nelson qui ne manquait pas d’attraits pour un tourisme plus conventionnel.

Day one ou Good Bye Windy Welly

Photo

Picton to Renwick 45 km 3h03 sur le mono, vitesse moyenne 14,8

L’arrivée au large de Picton et les premiers paysages de l’île du sud sont des plus agréables. Le ferry se faufile au milieu des « Marlborough Sounds » un ensemble d’îles aux formes irrégulières proches de la côte déjà elle même très escarpée, le tout formant presque un puzzle.
Il est 11h15, le ferry approche doucement de la pittoresque petite ville de Picton. Une fois débarqué, je ne traîne pas, j’ai hâte d’être enfin sur la route. Déjà que Wellington ne sentait le stress pour une capitale, ici on se sent tout de suite relax. Je n’ai pas de mal à trouver ma route, à vrai dire il y a peu de choix possible. Le seul problème est le trafic de poids lourds important après que chaque ferry ait déversé son lot de véhicule.
La route, équivalente à une de nos nationales, est belle et bien revêtue avec une B.A.U. suffisamment large pour ne pas trop stresser à chaque dépassement de camions. Outre les camions la seule vraie difficulté à prévoir durant cette journée est une côte de 1km, dite modérée, à la sortie de la ville. En effet la côte n’est pas mortelle mais elle me permet de réaliser l’incidence de la charge au dos sur ma capacité à gravir les nombreuses côtes à venir dans les prochains jours. Pour me mettre totalement dans le bain, dans le cas ou je n’aurais pas bien compris ce qui m’attendait, alors que je suis presque au sommet de la côte, une claque de vent de face me rappelle que même dans l’île du sud je devrai faire avec lui.
Je me sens bien en forme après ma sieste dans le ferry, je vise donc d’atteindre Blenheim, la plus grande ville de la région, sans trop m’arrêter (28km) Rien de bien particulier sur ce tronçon si ce n’est que je m’enfonce doucement dans la campagne. La route est bordée de larges propriétés avec de grands pâturages où j’aperçois mes premiers moutons.
Un court passage viendra cependant rompre la monotonie de ce tronçon. En traversant une petite ville la route et sa B.A.U. perdent un peu de leur largeur et immédiatement à ma gauche se trouve la voie ferrée, séparé de la route par une minuscule barrière toute symbolique. Bien que je ne me sois pas arrêté pour mesurer l’écart entre la voie ferrée et la B.A.U. je suis certain que sur quelques dizaines de mètres il y a moins de 5 m. Et bien devinez quoi ; je trouve le moyen d’être dépassé simultanément par le train et un balèze de camion. Croyez moi j’en menais pas large. Ca fait une sale impression.
Mon guide me signale qu’il y a un grand vélociste dans Blenheim. Une idée me traverse l’esprit ; cherche donc une grosse sacoche de selle. Ca sera toujours ça de moins dans le sac à dos.
Et hop ! De la réflexion naît l’action. Je quitte ma route et me mets en devoir de trouver le shop.
Effectivement c’est un grand magasin bien fourni en beau matériel. A peine pénétrais-je dans ce temple de la bicyclette qu’un disciple de la petite reine vint à ma rencontre pour m’aider à trouver le salut de mon séant.
Mine de rien, le peu de chose que j’arrive à mettre dans cette sacoche m’apporte un léger gain de confort.
C’est pas le tout mais je commence à avoir faim. Je m’arrête devant un « Take away » asiatique susceptible de me servir autre chose qu’un morceau de cadavre entre 2 tranches de pain insipide.
Zut ! c’est fermé. Je me doute que je ne trouverai plus rien jusqu’à l’arrivée à Renwick. Je dois donc trouver quelque chose avant de quitter cette ville.

Par Sainte Cocotte des antipodes !

Que vois-je de l’autre coté de la rue ! Un superbe pub bien conforme à la tradition. La courte étape d’aujourd’hui me permet de prendre un peu de bon temps. Profitons en ! Devant le nombre impressionnant de pompes à bière disponibles au comptoir, je cède à la tentation et me vois dans l’obligation de « consommer local » pour arroser mon repas.
Il me reste une bonne dizaine de km à parcourir sans difficulté particulière. Quoique à partir de Blenheim j’ai changé de direction et j’ai maintenant un vent de face qui ne mollira pas jusqu’à Renwick.
Ma vitesse s’en ressent, 13 à 15 km/h, pas plus. Je m’inquiète pour la longue étape du lendemain (92,5 km) car je roulerai exactement dans la même direction … Sans être désagréable, ce dernier tronçon est un peu monotone. La route est toute droite, en plaine, au milieu des vignobles et il n’y a pas grand chose à voir. Ceci dit, il fait beau, j’ai bien mangé et je me sens bien.
Arrivé à renwick, je trouve le backpacker sans difficulté sur la route principale à l’entrée de la ville. Il est confortable et j’y suis accueilli très chaleureusement. En me baladant dans la petite ville pour y trouver ma pitance je découvre un « Visitor Information Center » Je m’empresse d’aller recueillir quelques informations sur la longue route qui m’attend demain …

OUTCH ! Suis-je bien dans un « Visitor Center » ? Good morning le bordel là dedans !

Je me trouve plutôt dans échoppe à mi chemin entre la mercerie, le kiosque à journaux et la boutique de souvenirs. Il y a dans ce lieu un bric-à-brac indescriptible avec une densité d’objet au mètre carré impressionnante dont entre autre ; toute la famille à Teddy sur 7générations. Une dame, plus très jeune, tricote nonchalamment au milieu du fatras et me salue très poliment. A mon tour je la salue et me risque dans un : "Suis-je bien dans le « visitor center » ?
Ce à quoi elle répond quelque chose du genre : "Mais parfaitement mon garçon. En quoi puis-je vous être utile ?

OK ! J’accepte l’idée que je suis bien dans le « Visitor Information Center » de Renwick …

De fil en aiguille (l’expression tombe à point nommé vu le caractère de l’échoppe) en causant assez longuement avec la dame, qui malgré tout a une bonne connaissance de la région et de sa météo, je réalise que l’étape du lendemain sera vraiment très dure, voire trop dure ; 92,5 km - 700 m de dév+ avec une pente quasi constante - le vent de face - un seul point d’eau à Wairau Valley au 25e km, hormis quelques fermes isolées - et peu avant l’arrivée 6 km de « hard climb », dixit mon guide.

J’hésite longuement si je dois écourter cette étape et de quelle manière ?

Si je démarre de Renwick, me disant « si c’est trop dur et je n’en peu plus je finis en stop » Seulement voilà ; ma destination pour cette deuxième journée est St Arnaud, un hameau abritant 215 âmes situé à peu près au milieu de nulle part. Il est vraiment peu probable qu’il y ait dans ce secteur un trafic automobile important. Je me vois mal agonisant sur le bord de la route, attendre l’hypothétique venue d’une bétaillère voulant bien me charger à bord avec ma grande roue. En plus ce n’est pas trop dans ma nature de me dire : « je suis crevé, je m’arrête et j’attend une voiture » Si tant est qu’elle veuille bien s’arrêter. Je suis plutôt du genre à m’obstiner bêtement tant qu’il y a un souffle de vie, et ce jusqu’à un épuisement total.
Sois raisonnable me dis-je …
C’est décidé. Avec l’aide de la « mercière », je me commande un taxi qui viendra me chercher à 7:45 devant le backpacker et me déposera 25 km plus loin à Wairau Valley. Il restera suffisamment de quoi étancher ma soif de km.

Avec la fatigue accumulée au cours des 3 jours précédents (UNICON) il est 21:00 et je tombe de sommeil. Bonne nuit …

La suite, la suite !

Par contre j’arrive pas à voir tes photos, il faut se connecter et j’ai pas de compte…

Idem !

Hier soir j’ai déposé une offrande aux pieds de Ste Cocotte des hauts plateaux de St Ger, en la priant de satisfaire à ma requête. Il semblerait que mon voeu ait été exhaussé. 8)

Espèce de mécréant, quels sont ces dieux que tu ose célébrer ? Tu finira sur un bucher !

Sinon les photos sont chouette ça avait l’air joli !
J’attend la suite du compte-rendu ! :stuck_out_tongue:

maintenant, on peut voir les photos (c’etait ça ton voeu?) ça fait envie!
On veut la suite!

[HS:]et Teddy,quand est ce qu’il se met vraiment au mono? Tu comptes lui acheter un 3" bientot?

c’est surtout la cocotte qui finira sur le barbeuk, si tu veux mon avis!
[/HS]

Bon, faut que j’revienne rouler avec vous, ça me donne envie tout ça !
Mais … je garde un très mauvais souvenir de mes premiers 50km, à cause des montées : hyppo glycémie, et entre jambe. Sauf que ces deux problèmes sont (plus ou moins) réglés (sucre rapide et cuissard sont avec moi).
Raah, c’est trop beau la nouvelle Zélande, en tout cas !

Salut Tonton zip !

J’ai enfin trouvé le courage de lire ton récit d’aventure. Sympa ! I wish I had been around…

C’est trop beau, merci pour ton récit !
Ça donne réellement envie !!!
A bientôt sur la route à Forcalquier ou avant :wink:

Day Two ou « je n’ai jamais autant apprécié le taxi »

Photo

Renwick to St Arnaud - 68,4 km - 5h10 de pédalage - vitesse moyenne 13,2 km/h

Dringggg ! fait le réveil à 6:45 ce matin. Dans une heure ton taxi vient te chercher … Il faut donc que tu sois prêt … Allez ! Remue toi ! A table !!!
Bien que logeant tous les jours dans un « backpacker » avec sa cuisine à disposition, je ne m’embarrasserai pas à cuisiner quoique ce soit pendant cette semaine. Pas envie non plus de transporter le moindre gramme supplémentaire avec d’éventuels restes.
Mon menu d’hier soir m’a tellement plu que sitôt l’avoir terminé je retournais dans le « takeaway » pour commander à peu près la même chose mais cette fois ci pour le breakfast du matin : 1 végé burger - 3 hash browns - des fruits et bien sûr mon grand café noir sans lequel j’ai beaucoup de mal à faire face aux turbulences du monde qui m’entoure …
Un coup de micro onde et me voilà attablé devant un copieux p’tit déj. Hormis le patron de l’établissement qui s’affaire déjà aux tâches quotidiennes il n’y a pas grand monde de réveillé. Ce dernier me signale que mon taxi est arrivé mais avant cela me fait part de son désir de me prendre en photo sur mon « drôle d’engin » No souci mon brave. Dès lors qu’il s’agît de jouer la star, Teddy est toujours prêt. Je lui arrange la mèche et hop en selle pour une petite séance photo. Bien qu’habitué à recevoir des cyclistes de tous poils le patron me dit que c’est la première fois qu’il accueille un monocycliste.
Le taxi est en fait un utilitaire de taille respectable. Il n’y a pas de problème pour y loger le mono et mon sac. Le chauffeur, respectable lui aussi mais par son âge, fait naître en moi une pointe d’inquiétude. L’homme, au visage buriné, me paraît bien usé par le temps. A moins que cela ne soit le résultat d’une consommation régulière et excessive de Tui ou de Speight’s, les bières locales … Encore une fois, no souci. La « dernière prise » semble être suffisamment éloignée, quoique un léger « syndrome parkinsonien » persiste, mais l’homme est fort sympathique.
Pendant les 20 minutes de trajet nous engageons une intéressante discussion au sujet des possums. Mammifère - marsupial - arboricole - omnivore - pouvant atteindre les 1,20 mais le plus souvent de la taille d’un gros chat. Cette espèce est très nuisible en NZ. La chasse au possums est un « sport national » On peut même trouvé des peluches représentant des possums écrasés par une roue de voiture. On peut même parlé de guerre contre l’animal puisque dans certain cas l’armée est intervenue.
En gros ; un bon possum est un possum mort …
Au début j’avais du mal comprendre les fondements de cette volonté d’éradiquer le possum de NZ (sensibilité végétarienne oblige) Mais à la reflexion il semblerait qu’il n’y ait pas d’autres issues. L’animal a été introduit par l’homme entre 1837 et 1920 pour développer une industrie de la fourrure. Depuis sa population ne cesse de croître car il est prolifique et il n’a pas de prédateur naturel. On estime sa population à 70 millions d’âmes (et pourquoi les possums n’auraient pas d’âmes …) provoquant un désordre écologique très sérieux sur la flore et indirectement sur la faune.
Mon chasseur de possums me jette à mon nouveau point de départ, Wairau Valley qui n’est qu’un lieu dit avec 3-4 maisons et une station service possédant un minuscule rayon alimentation. J’aurai pas besoin de ce point ravito puisque je démarre ici même.
Le seul intérêt de l’endroit est le propriétaire de la station service. Un petit bonhomme d’une bonne soixantaine d’années. Celui que l’on pourrait imaginer ne posséder en tout et pour tout dans sa garde robe que 2 vêtements ; un bleu de mécano et un costard pour le dimanche. L’endroit est tellement isolé et calme que l’on comprend aisément que notre pompiste passe l’essentiel de son temps à restaurer des vieilles bagnoles. J’ai la chance d’admirer de près la magnifique Dodge de 19… (m’en souvient plus) garée devant la station service. Admiratif je tourne autour de la voiture comme un végétarien autour d’un végéburger dans un MacDo. Doc’ Mécano me déclare avoir passé quelques milliers heures à la restaurer. La finition est absolument remarquable tant à l’extérieur qu’à l’intérieur.
Oops ! Il n’y a pas encore le plancher. Ca surprend !
Ces premiers 25 km en taxi ne me laissent que peu de regrets, tout aussi plat que les 10 derniers km de la veille avec sensiblement les mêmes paysages. Il est 8:30. Il fait grand bleu dans le ciel. Le vent est léger. Je démarre . Let’s go Teddy !
Je roule pendant une heure à presque 15 km/h de moyenne sans le moindre pied à terre. Le soleil est légèrement voilé mais la température reste douce. Le paysage devient plus intéressant au fur et à mesure que je m’enfonce dans la vallée entre les deux massifs montagneux que sont ; Richmond range au nord et un autre massif au sud que je ne parviendrais jamais à nommer … Allez hop ! C’est reparti pour une heure.
Cette deuxième heure est déjà moins facile. La route commence à s’élever doucement entre les montagnes qui se resserrent progressivement sur la vallée. Le vent s’est maintenant réveillé. Sans être violent c’est néanmoins une réelle résistance à ma progression. Mon compteur me confirme mes sensations. Aux termes de cette deuxième heure de route ma moyenne est passée à 13,6 km/h. Il fait toujours « beau » mais une fine couche de nuages s’obstine à voiler le soleil en permanence. De ce fait avec le dos mouillé et le petit vent je finis par avoir froid et m’abrite dans une petite cabane pour cette courte pose. Allez hop ! On repart pour une heure avant la pose repas.
C’est au km 41,5 que je décide de me restaurer pour de bon. Outre le fait que j’ai réellement faim, je suis ravi à l’idée d’alléger un mon sac d’un peu de nourriture. Je commence à ressentir également la fatigue. Ce tronçon de route ne m’offrira guère le choix pour trouver un endroit sympathique, à l’abri du vent si ce n’est cette charmante aire de pique nique au bord de la rivière Wairau. Il fait maintenant grand soleil j’en profite sans modération et m’offre pour le désert une petite sieste. Quelques rares voitures s’arrêtent aussi pour profiter du joli spot ( Kowhai Point Scenic Reserve)
C’est pas le tout mais les meilleures choses ont toujours une fin et il faut repartir pour 25,5 km. La moyenne a encore baissé un poil. J’en suis maintenant à 13,2. Je conserverai cette moyenne jusqu’à mon arrivée à St Arnaud.
La route est de plus en plus agréable et flirte souvent avec la rivière m’offrant ainsi de belles vues. Moins rectiligne, de courtes montées et descentes s’enchaînent. Les virages sont difficiles à négocier car au beau milieu des courbes, la pente souvent associée à un dévers, devient plus forte et en sortie de virage c’est une claque de vent qui finit de t’achever. Sur cette étape je ne chuterai qu’une fois dans ces circonstances. Apres la pause repas je m’arrête plus souvent pour des micro pauses. Dont l’une d’entre devant le mémorial à la gloire de John Henry Cooper, l’homme qui a introduit pour la première fois le mouton dans la région. Enchanté, Monsieur, my name’s Zippedy, Zippedy Doo Da !
Me voilà bientôt au début des 6 km d’ascension dite « hard » J’angoisse un peu vu la difficulté que j’ai eu à passer certains virages précédemment. Ce qui fera toute la différence c’est la relative absence de vent durant cette longue côte. L’orientation de la pente ainsi que la végétation plus dense m’épargnent quelques claques de vent qui à coup sûr m’auraient mis à terre. Ceci dit je me bat comme un diable dans cette côte et me trouve des ressources insoupçonnées. Je m’attendais même à ce que les moutons, nombreux par endroits, me félicitent. Mais non, suis-je bête un mouton ne peut pas applaudir … Ouh la la ! Il est temps que j’arrive. J’ai besoin de repos moi …
A propos de moutons, figurez-vous que ; un mouton c’est bête, mais deux ou trois cent moutons, ça l’est bien plus encore … Après cette redoutable côte il me reste 5 km, plutôt descendant, à faire et le paysage est très joli. De très verts pâturages sur lesquels se dressent des arbres impressionnants nourrissent de non moins impressionnants troupeaux de moutons, de part leur nombre. L’étape du jour est gagnée, je traîne un peu et décide de prendre quelques photo de ces troupeaux. A peine descendu du mono et prêt à dégainer l’appareil et c’est deux ou trois cent moutons qui foutent le camps à l’autre bout du champ. Zut alors ! j’ai dû leur faire peur. Je recommence l’opération 2 ou 3 fois en prenant soin d’y aller doucement, très doucement. Rien n’y fait et tout monde se barre avant même que j’ai le doigt sur le déclencheur. J’ai eu beau leur dire que je ne mangeais plus leur mères encore moins leurs frères, leur brandir ma carte d’adhérent à P.E.T.A. (*) Que nenni ! Que dalle ! Aucune reconnaissance. Vraiment la vie est trop injuste …
Je reste quand même sous le charme de la blancheur de leur lainage contrastant avec le vert soutenu des pâturages.
Je fonce sur St Arnaud. Ca tombe bien le ciel s’assombrit sérieusement et je finis même avec quelques gouttes de pluie.
Ah ! St Arnaud, sa croisette, son casino, ses yachts … Tu parles ! 215 habitants - Le trou du cul du monde ! (vieux proverbe Maori) En fait c’est l’impression que cela donne en arrivant à la tombée de la nuit, sous la pluie, un soir de grand vent. Ceci dit l’essentiel est là ; gros dîner et dodo. Je suis étonné de trouvé un aussi gros complexe hôtelier ici. L’intérêt de St Arnaud est en fait sa situation au bord du lac Rotoiti. Porte d’accès au Nelson Lakes National Park et aux stations de ski. L’hôtel comporte plusieurs bâtiments dont l’un d’entre eux est un « backpaker ». Je ne comprend pas trop bien les explications du gars à la réception et me tape 3 tours du complexe avant de trouver le dortoir. J’en ai marre, je commence à être bien fatigué, j’ai froid.
Après une bonne douche je suis de nouveau d’attaque pour le dîner que je devine très bon à la lecture de la carte. En effet ce sera probablement le meilleur restaurant de tout mon séjour en NZ.

Bilan de cette journée : La plus sage décision de toute ma vie de monocycliste, je l’ai prise hier soir en réservant ce taxi. Dans l’hypothèse peu probable où j’aurais pu parcourir les 92 km de l’étape initialement prévue, je n’ose imaginer dans quel état je serais arrivé.
Sans le vent je crois fermement que c’était jouable.
Je n’ai jamais autant apprécié le taxi …

(*) People for the Ethical Treatment of Animals

quel bavard ce Zippedy !

:open_mouth: Moi je pourai pas faire ça tout seul!

j’adore « les aventures de Zippedy le solitaire » :smiley:

Vivement la suite!

Il est pas tout seul, y’a Teddy !

Un vrai régal à lire :slight_smile:
Merci

Ouais, et en plus il est aussi bavard que Zip :laughing:

Ah ok :laughing:

La suite, la suite !

tonton zip, je trouve que tu pourrais laisser un peu la parole à ce pauvre Teddy, qui a sûrement lui aussi des tas de choses à raconter :wink:
On veut la suite!

Day three ou « jamais je n’ai autant aimé la pluie »

St Arnaud to Nelson

92 km - 6h09 sur le mono - vitesse moyenne 15 km/h

photo

Je suis remonté à block pour cette étape. Il faut dire qu’il y a de quoi être motivé ; elle est annoncée pour 89 km avec un profil globalement descendant, les 5 derniers km au bord de la mer et 2 jours de repos à Nelson. Il n’en faut pas moins pour me tirer du lit avec l’énergie du conquérant. A 7:15 je suis déjà dans la cuisine pour me préparer mon p’tit déj. Je ne suis pas le seul cette fois. Autour de moi ça papote et ça grignote déja dans un brouhaha feutré et polyglotte. Sur la table, sont éparpillés différents magazines et journaux parmi lesquels un Playboy en allemand et un journal local. Trop content de combler mes lacunes teutoniques je approprie le magazine et désireux de savoir si le ciel me tombera sur la tête aujourd’hui ou demain je ramasse le journal.

Oh! stupeur et tremblements !

En feuilletant le … journal je tombe sur une photo de la Grande Bretagne, non pas à poil, mais au contraire bien couverte d’un épais manteau neigeux. C’est une photo satellite de bonne qualité montrant l’intégralité du pays recouvert de neige sans la moindre exception. Je n’avais jamais vu ça. Je savais qu’il faisait froid dans le « far ouest » mais pas à ce point ! Quelque peu choqué et démoralisé en pensant à ces pauvres européens congelés je replonge immédiatement dans le Playboy. C’était bien plus prudent pour garder le moral durant cette journée.
Sitôt le pt’it déj. terminé je quitte les lieux sans tarder pour aller voir le lac Rotoiti qui est à 5 mn de l’hôtel mais à l’opposé de la route de Nelson.

Outch ! Mille millions de Teddy mouillés !

Bonjour la tristesse ! Le plafond est bas, très bas. A peine ai-je mis le nez dehors que je prend conscience que cette journée sera, sans crème solaire …
Quelle déception ! Ce lac qui devait apparaître comme un joyau niché au coeur des montagnes a l’air bien triste vu au travers de ce méli-mélo de nuages et de pluie fine. Petit réconfort cependant, pendant ma contemplation des lieux, une famille canard, peu farouche, viendra me tournicoter autour des jambes. J’en ai assez vu, je repars vers la réception de l’hôtel où j’ai laissé mon sac. Le gars de la réception m’interroge sur mon périple et insiste pour me voir démarrer. C’est bien ma veine, pourvu que je ne me rate pas lamentablement au démarrage devant témoin … YOUPI ! C’est parti du premier coup. C’est pas grand chose mais ça met de bonne humeur. Il est 8:30. En route vers Nelson !
Il me faudra d’abord gravir les 5 km de descente qui m’ont amenés à St Arnaud la veille, avant d’être véritablement sur la route de Nelson. Bon, y a pas à dire, 5 km de côte à froid ça met tout de suite dans le bain. Ceci dit une incroyable sensation d’aisance et de facilité m’accompagne pendant cette première côte …

"Cré nom de nom j’hallucinions. Par les baloches du cornu j’ai dû abuser du litron "

Et ben non mon Teddy. Tu ne rêves pas. On n’est bien entrain de vivre un miracle … Il n’y a pas le moindre souffle de vent.

Mais quel bonheur ! Je réalise et apprécie d’autant plus que c’est la première fois que cela arrive depuis mon arrivée à Wellington le 24 décembre. Une fois franchie cette première côte je m’élance sans retenu dans cette longue descente. L’euphorie du moment ne parvient pas à me faire oublier que j’ai un sac dans dos. Descente ou pas je roule à 20 km/h maxi. Au delà de cette vitesse le ballant du sac est trop déstabilisant pour moi. Au bout d’une heure j’ai parcouru presque 15 km y compris la côte du départ. C’est dire si ça va bien !
Durant cette première partie de route je n’aurais que pour paysage essentiellement des forêts. Elles sont magnifiques et sublimées par la pluie fine qui rend chaque feuille luisante. Quelquefois ce n’est plus de la pluie mais une brume de nuages mais le résultat est le même : ça mouille ! Le ciel reste malgré tout très lumineux. La température est douce, tout comme la pente qui ne nécessite pas une concentration particulière. Je me laisse aller, serein, profitant presque de chaque tour de roue qui pour une fois ne nécessite pas le moindre effort.
Lors d’une pause, je vis ma première attaque de « sandflies » Une créature diabolique, aussi discrète que le moucheron et plus redoutable que le moustique. Deux options : la fuite ou la lotion anti-moustiques locale qui va bien. Je me vaporise et m’enduis sans modération. Je suis sauvé !
Entre 2 cacahouètes, je regarde Teddy droit dans les yeux et m’engage solennellement sur la déclaration suivante (ba oui si c’est solennel il me fallait bien un témoin) :
" Quoiqu’il arrive aujourd’hui, je m’interdis de me plaindre de la pluie. Je suis trop content qu’il n’y ait pas de vent …"
Nous portons un toast à la pluie et repartons le coeur joyeux.
Au fil des km, aujourd’hui comme hier je croiserais pas mal de motards. Chacun d’entre eux me fera un petit signe. Apprécient-ils l’insolite ou ont-ils reconnu le motard passionné qui se cache derrière le monocycliste ? Plus drôle, je croiserais également les 2 australiens à vélo que j’ai rencontrés sur le ferry. Echanges d’amabilités, blablabla, je leur recommande chaudement le restaurant d’hier soir en leur détaillant le menu. Je suis sûr qu’ils en bavent encore … Mine de rien je viens quand même de franchir la troisième et dernière difficulté de la journée (dixit mon guide …) Les deux dernières sont deux sévères côtes de 3 km chacune vers le 20e et 36e km. Ca passe tout juste avec les 125 mais pas un pied à terre cependant. Je continue de plus belle encouragé par les petits coins de ciel bleu qui apparaissent de temps en temps. Le reste de la journée s’annonce plutôt bien, d’autant plus que les 2 australiens m’ont dit qu’il y avait du soleil à Nelson ce matin. Vers le 50e km je quitte pour de bon les forêts et me rapproche des zones plus urbaines. Je fais ma pause repas non loin de là vers le 57e km. Jusque là j’ai roulé pendant 3:36 à la moyenne de 15,7 et me suis arrêté pendant 55 mn sur plusieurs petites pauses.
Je trouve une aire de pique nique, tranquille, assez loin de la route qui est maintenant un peu plus fréquentée. Mes vêtements de routes sont étalés un peu partout autour de moi. Non pas que je sois trempé mais entre la transpiration et la pluie fine je commençais à mouiller. En plus le ciel se recouvre, une petite brise se lève, j’ai besoin de vêtements secs pour ne pas avoir froid. C’est Teddy qui est particulièrement content. Il en avait marre d’être sous la housse du sac à dos et manquer d’air. D’un autre coté il est propre et sec. Non Non ! Ne riez pas. Un Teddy mouillé ça pèse grave sa ourse …
Avant de repartir je scrute le ciel avec inquiétude. Il peut très légèrement mais quelques coins de ciel bleu résistent tandis qu’au loin la situation semble s’améliorer. Prudent, je remet Teddy sous la housse et j’enfile ma veste de pluie. Nous verrons bien …
6km plus loin je m’arrête à Wakefield dans un dairy/café pour téléphoner et rencontrer quelqu’un. En fait un plan foireux qui n’aboutira pas … J’en profite pour prendre un café au chaud et au sec. En fait en 6 km la situation a bien évolué et s’est même franchement dégradée. Il pleut de grosses gouttes maintenant. Le ciel est lourd de gros nuages et plus le moindre espoir d’amélioration au loin. Il me reste 30 km à faire …
Teddy est passé de lui même en mode apnéique tandis que je fignole la fixation de la capuche de ma veste sur mon casque. Comme mentionné plus haut, je ne me plains pas, le vent reste très modéré.

Plus que 15 km. Pour résumer, je n’ai plus trop envie de faire du tourisme car ça va de mal en pis. Il pleut encore plus fort et plus je me rapproche de la mer et plus le vent souffle.
Vieux proverbe Maori : " On ne va pas se mettre la rate au court bouillon" n’est ce pas ! J’ai largement le temps d’arriver avant la nuit. Je m’arrêterai aussi souvent qu’il le faut pour me refaire une santé dans les cafés ou autres du bord de mer.
Et bien ça ne se passera pas comme ça. C’est incroyable ! Sur les 20 derniers km il n’y a pas un seul endroit où je peux m’abriter. J’enrage !
Les 10 derniers km se font sur une piste cyclable très en retrait de la route. Heureusement d’ailleurs car maintenant ma progression devient héroeïque. Avec les bourrasques de vent et la pluie qui tombe à verse je préfère ne pas être sur la route principale, assez fréquentée. Quel dommage ! La piste cyclable est si agréable. Elle n’est jamais rectiligne alors que la route, le long de laquelle elle est tracée, est toute droite. La piste serpente, monte et descend sur de courtes distances, au milieu d’une végétation abondante et ce presque jusqu’au centre ville. En temps normal ce tronçon doit être un must pour la balade. Je me console en me disant que je ne risque pas ma vie à chaque fois qu’une voiture ou un camion me double car la visibilité, dans ces conditions, est vraiment mauvaise.
Rien ne me sera épargné me dis-je. Il y a tout un réseau de pistes cyclables dans Nelson et sa périphérie. Je dois m’arrêter plusieurs fois pour chercher celle qui me mènera à l’hôtel. Ouf ! Je le vois enfin, le YHA de Nelson. Il y un hall d’entrée qui est en fait un sas dans lequel je peux m’égoutter, m’essorer à souhait pour reprendre une forme plus humaine avant de me présenter à la réception.
A première vue l’hôtel a l’air moins confortable que celui de Wellington mais tout y est pour le voyageur monocycliste détrempé que je suis. Le mono est en lieu sûr dans un parc à vélos fermé à clé. Et moi, avant même de passer à la douche, je passe par la laverie pour mettre tous mes fringues mouillés au lavage et profiter du séchoir.
Bon ! On est pas là pour rigoler !
Perception de savon et douche puis perception de bières et sérieuse séance de réhydratation. On est jamais trop prudent. Des fois que ma séance de mono-thalasso n’ait pas suffi à hydrater les couches profondes de mon épiderme.